... et ses vagues.
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Ce texte n'est pas intégralement inédit : certains
passages ont été antérieurement publiés par son
auteur dans des forums.
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Personne n'est contraint de passer un examen d'Aikido (sauf désir d'enseigner, d'un balisage officiel de sa progression, ou problème d'ego).
Mais à partir du moment où un examen existe (et dans quelque domaine que ce soit), il est légitime de revendiquer que quelques principes soient respectés. Par exemple :
La grande majorité des passages de dan est certainement irréprochable. Mais un nombre significatif de ces épreuves se déroule dans des conditions qui suffisent à pourrir l'image de notre art martial.
Depuis quelques années les mécontentements ont été grandissants, jusqu'au jour où certains juges en ont fait une épreuve où l'examiné n'est plus celui que l'on pense. Et on en vient à parler de partialité, d'irresponsabilité, d'opacité et de dévoiement des finalités.
Tout ceci s'inscrit dans une évolution des mentalités qui dépasse de très loin l'Aikido, et qui ne contribue plus à l'acceptation de n'importe quoi.
L'ETAT DES LIEUX
Tout d'abord, une petite remarque préalable : il n'y a pas si longtemps (avant 2004), le candidat passait devant 4 juges pour 45 mn d'examen, ce qui est la moindre des choses pour évaluer au moins 5 à 6 ans d'apprentissage, et qui paraît normal pour les autres arts martiaux. A cette époque, les dan n'étaient pas globalement contestés.
Le "Quoi ?"
Que juge-t-on ? Pour l'instant tout et n'importe quoi suivant le bon vouloir du jury.
Actuellement, qu'il s'agisse du 1er ou du 4ème dan, le catalogue officiel (et encore ne s'agit-il que de techniques "préconisées" !) compte plus de 200 techniques de mains nues (188 répertoriées + une vingtaine de versions de kokyu nage). S'y ajoutent environ 4 à 5 techniques de jo (puisque c'est en principe un juwaza sur tsuki) et une quinzaine au tanto (puisque c'est plus ou moins un juwaza de quatre à cinq techniques sur shomen, yokomen et/ou tsuki au choix de l'examinateur). A partir du 3ème dan, s'ajoutent quelques autres techniques au bokken ou au jo.
On ne sait même pas si, pour le 1er dan, les techniques correspondant aux attaques Eri dori, Muna dori, Hiji dori, Jodan Tsuki sont au programme.
Certes, il est des examinateurs qui n'interrogent, à ce niveau, que sur les techniques de base, mais c'est laissé à leur bon vouloir, et le candidat n'est pas censé en être informé au préalable... Tout dépend de savoir si son professeur a su négocier la chose.
Les juges font donc référence à des formes dont la description n'existe nulle part officiellement. Ce qui ne signifie pas qu'elles ne soient pas détaillées officieusement lors des sessions d'information préparatoires (auxquelles certains juges se permettent de ne pas aller) mais de cela les candidats n'ont pas connaissance. Références à des formes qui, en fin de compte, ne peuvent donc servir que de preuves à charge.
A côté de cela, des pans entiers de l'Aikido (la maîtrise des armes, ou des styles issus de maîtres reconnus mais peu représentés en France) passent complètement à la trappe.
Le "Comment ?"
Il se trouve des examinateurs très compétents pour prétendre qu'ils peuvent juger d'un candidat définitivement sur le seul ShomenUchi Ikkyo (on retrouve, hélas, cet état d'esprit dans le monde professionnel, à grand dommage). Bravo d'être aussi géniaux, justifiez-vous, cela pourrait peut-être aider à l'élaboration de la fameuse grille d'évaluation.
Pour tenir les quotas (aux environs de 50% en particulier lors des sessions de juin), une fois qu'on a été indulgent avec les élèves des copains, il faut pouvoir éliminer. Si on fait passer tout le monde, c'est le groupe d'à côté qui trinquera (question bête : quelle est la proportion de candidats gros ou timides parmi les admis ?)
On voit reprocher "vous n'attaquez pas", "shikko pas beau", "en HanmiHandachi waza vous pivotez sur un seul genou", "vous n'auriez pas pu le déstabiliser" etc. etc.
On invoque à tour de bras des concepts dont il serait cruel de demander l'explication à certains examinateurs. "Manque d'irimi !" : cela voulait-il dire, dans l'esprit de l'examinateur, que le candidat manquait de tonus, ou qu'il privilégiait abusivement des formes tenkan ? "Un problème de Ma aï ou de De aï" : fort bien, la distance et le timing sont bien sûr des points essentiels. Mais le candidat pratiquait-il trop loin ou trop près ? Etait-il trop rapide, ou trop lent, ou mal synchronisé, ou saccadé, ou déconcentré ou... Et quid d'un "problème de shisei", concernant ce candidat si tonique et détendu ? Un nippophile averti serait en droit de se demander parfois ce qu'un recours inconsidéré à des concepts nippophones (souvent nébuleux pour des esprits occidentaux) doit au goût pour le flou artistique, et au manque d'argument.
En somme, trop souvent, c'est un système orienté-élimination, mais négociable.
Le "Qui ?"
Les mesures envisagées dans le cadre du projet de refonte montrent que la Commission a bien conscience des failles du système au niveau des aptitudes de certains juges. Passons donc ce point.
Le "Dans quel but ?"
Le but devrait être de jalonner de manière objective le parcours des candidats.
Si certains élèves insuffisants harcèlent leur enseignant pour "aller au dan", il est également notoire que certains élèves de bon niveau sont envoyés au dan pour satisfaire au nombre de "hors quota" du dojo (censé rassurer sur la probité candide et le linge blanc du professeur), ou carrément pour régler des comptes.
Et trop souvent les candidats ne sont que les pions sur un échiquier de guerres et d'alliances de chefferies, entre les fédérations et en leur sein même (que l'on ne saurait voir) . Ils sont les thermomètres de l'entregent de chaque dojo.
La situation est probablement plus marquée en IdF pour des raisons logiques, à défaut d'avouables : règlement de comptes ostensibles vis-à-vis d'enseignants qui dérogent aux règles du clientélisme, machine à bâcher les élèves grande gueule etc. Sujet moins souvent abordé (plus embarrassant ?) : le côté arrière-boutique de clan, à proximité du pouvoir, là où les tentations sont autres, et le manche du marteau plus court.
Où on voit jusqu'à l'affichage d'un arbitraire comme démonstration de pouvoir et d'invulnérabilité. En affaires, les choses doivent se savoir "pas trop", pour ne pas déclencher un tollé, "mais suffisamment" pour faire tenir tranquille si on tient à sa carrière. Tout un art, là aussi. Bref, un régime féodalo-jacobino-bananier et un petit bijou de l'Exception française.
A partir du moment où un parcours obligé est bâti en particulier autour de l'accès à l'enseignement, et qu'il y a des conflits de personnes, il peut effectivement se construire une stratégie du pouvoir bien intéressante à observer. Maintenant chacun en fait ce qu'il veut : on peut s'en amuser, s'en décourager, s'en désintéresser (il y a probablement des pays où les administrés ne veulent pas du droit de vote. Il ne faut pas se plaindre après). On peut aussi trouver son compte à l'opacité, question dont on parle beaucoup dans la Presse actuellement dans un tout autre contexte. En tant que tel tout ceci n'a apparemment aucun intéret, mais on sousestime souvent le rôle des symboles. Et puis on n'est pas obligé non plus de mourir idiot lorsque ça atteint, et c'est parfois le cas, la pitrerie.
Ceci dit, il se trouve des pratiquants pour expliquer sur les forums qu'ils s'en trouvent bien. En bref, ils veulent garder le système de "parrainage" actuel, à la condition, bien sûr, d'en bénéficier. Et, en ce domaine comme en d'autres, c'est probablement le pire.
En somme, cet examen est un concours qui ne dit pas son nom (et ce, entre autres, au détriment des petits dojo), un dan d'école qui le dit encore moins (et que les électrons libres aillent se faire voir), et un goulot d'étranglement pour l'accès à l'enseignement qui ne l'avoue pas du tout (et tant mieux si c'est tant pis pour les courants minoritaires).
Et ce dans le style d'attributions de prix littéraires ou de Légions d'Honneur, le tout sur fond de jeux du cirque et de Grand Prix de Rome.
EVOLUTION ?
Le "Projet de règlement"
Rappelons les principaux aspects techniques du "projet" :
Mais, et le point est important, dans le projet de règlement il n'y avait pas un mot concernant le quantitatif et le qualitatif du niveau demandé au candidat. En clair le problème des référentiels et des critères d'évaluation restait entier (seule l'ancienne liste des "techniques préconisées etc." était annexée).
La "consultation"
En juillet 2010, ce projet fut soumis, via le site Internet du ministère, à l'ensemble des pratiquants, avec appel aux commentaires, ce qui constitua une grande première. Ceci dit, il est fort possible que bien des pratiquants n'en aient pas été informés.
Toujours est-il que, sur environ 60 000 licenciés fédéraux (auxquels il faudrait ajouter les non-fédéraux) il y eut 145 réponses exploitables. Si on y ajoute les quelques uns qui, peut-être en plus, interviennent sur les forums, on n'arrive même pas à 200 aikidokas ayant réagi la question publiquement et par écrit,. Il y a de quoi rester sidéré devant si peu de réactions. Notons que, d'une manière générale, les FFAB s'expriment plus que les FFAAA : les 2/3 pour la réponse à la consultation, et apparemment idem dans les forums (et cela n'est pas un hasard). L'analyse de ces réponses brutes de décoffrage, a été publiée sur le site du ministère (février 2011).
Il faut donc relativiser le poids des réactions : elles formalisent les principaux courants de pensée - ce qui est déjà beaucoup - mais ne renseignent pas sur l'opinion de l'immense majorité de ceux qui ne s'expriment pas publiquement. Ceci dit, le simple fait de ce silence constitue aussi une information.
Pour s'en tenir aux critiques, si certaines ont été vigoureuses, elles ne portent finalement que sur peu de points :
La réponse du ministère
Dans sa réponse, le ministère souligne les points principaux d'évolution :
Discussion
Le pratiquant-qui-n'en-a plus-rien-à-faire-des-dan, mais qui estime que ces examens soulèvent suffisamment de questions essentielles pour s'y intéresser, est tout d'abord agréablement étonné devant une telle démarche ministérielle : de l'air, de l'air enfin !
Sur un plan plus technique, en parcourant les forums où les positions sont plus détaillées et dans un style moins formel, il est frappant de constater que les réactions au "projet" amalgament deux réalités très différentes : celle des 1er et 2ème dan d'une part, et celle des 3ème et 4ème dan de l'autre, comme s'il s'agissait d'une réalité monolithique. Alors que le projet lui-même, et c'est un point essentiel, tenait compte de ces différences.
Comme dit précédemment, les 1er et 2ème dan sont des examens devant vérifier l'acquisition de connaissances, tandis que, pour les suivants, l'appréciation est censée porter sur le perfectionnement de la pratique.
Le système des UV capitalisables ne concernait que les 1er et 2ème dan, précisément pour tenir compte de ces différences : Mais que n'a-t-on entendu dire au sujet de ces maudites UV qui ne posent aucun problème dans d'autres disciplines martiales : "On n'est plus à l'école" (à ce compte là, il ne faut pas passer d'examen), "on tronçonne l'aikido" (qui est d'une telle unité, n'est-il pas ?) etc. Et ce type d'objections plus ou moins dogmatiques se clôt en général sur un plaidoyer en faveur du "dan d'école".
Petit appel à de lointains souvenirs dans un tout autre registre : avant 1968 les cinq épreuves écrites du Baccalauréat se déroulaient à la queue leu leu sur deux jours et demi, au nom de l'unité de la culture. Et puis l'idée a fait son chemin qu'il ne s'agissait pas de faire état de son génie à un moment donné de sa vie, mais d'acquérir durablement des connaissances et de le prouver. L'épreuve de Français a été placée à la fin de la classe de 1ere, les épreuves de terminale sont espacées, et tout le monde s'en est trouvé bien.
Pour continuer dans l'analogie, les enseignements du CNAM sont validés par UV au cours d'un nombre indéfini d'années, et il n'est pas établi que cet enseignement soit plus incohérent qu'un autre, ni que ses ingénieurs soient déconsidérés.
D'où l'idée des UV, tout d'abord, et dont les notes positives sont définitivement acquises, en second lieu : ce système est rationnel pour une évaluation d'acquisitions.
Ici il ne s'agit pas de découper notre noble discipline en rondelles, mais - pour appeler un chat un chat - d'éviter qu'un candidat donné ne joue tout en moins d'un quart d'heure seulement, à l'éventuelle fantaisie de deux acolytes, susceptibles d'"influences" (voire carrément de pressions) et parfois, hélas, inaptes à la fonction d'examinateur. Et, accessoirement, rémunérés à un tarif ridiculement bas.
Etre constructif ? Donc, une suggestion...
Il faut définir un catalogue plus court (toujours pour le 1er dan), mais de techniques significatives par rapport aux aptitudes à évaluer, et un examen plus long, voire exhaustif, où les techniques sont appelées selon un ordre préétabli (comme c'est le cas dans certaines écoles) Ainsi on pourrait vérifier les connaissances, mais ne faisant qu'un appel "raisonnable" à la mémoire, à l'endurance physique et à la maîtrise émotionnelle, qui seront évalués à l'occasion des dan ultérieurs.
Voici une proposition de charpente pour le 1er dan :
Trois modules , selon le système "UV capitalisables" :
1) Les épreuves d'armes et de randori : identiques aux formules du "Projet" (mais, pour le 1er dan, avec jo ou tanto au choix du candidat, lors du 2ème dan : jo et tanto).
2) Un tronc commun obligatoire d'environ 50 techniques, admises uniquement dans les deux styles Aikikai, soit environ 20 mn, toutes passées dans un ordre préétabli (système déjà suivi dans certaines écoles), avec une pause de quelques minutes (changement d'Uke). En conservant le déroulement actuel : suwariwaza, hanmihandachiwaza, tachiwaza, ushirowaza).
3) Une épreuve complémentaire, obligatoire mais au choix du candidat :
Pour cette épreuve complémentaire, les candidats pourraient éventuellement passer devant leurs propres professeurs, et se présenter avec "leur uke" (qui pourrait être un 1er kyu, auquel cas la note d'uke serait gardée en prévision de son passage de dan et la meilleure des deux notes retenue). A noter que cette formule est nécessaire pour d'éventuels kata d'armes.
...Et pourquoi pas un "probatoire" ?
Et si l'on craint un afflux ingérable de candidats (bien improbable aujourd'hui), il reste la solution d'un "examen probatoire" de "figures imposées", en public restreint et sur un programme limité, permettant d'évaluer, au calme, les compétences purement techniques jugées indispensables.
Délocalisation possible
Les candidats pourraient demander à passer l'épreuve dans une autre région, ce qui serait nécessaire dans le cas où, ayant opté pour le "module complémentaire courant non-Aikikai", leur école ne pourraient pas présenter localement le nombre d'examinateurs du niveau requis. (Certains diront que ce serait, aussi, une manière discrète pour le candidat de récuser certains juges...).
Référentiel
Pour chaque technique figurant au programme, les formes admises seraient officiellement agrées, et feraient l'objet de videos de référence, éventuellement commentées par écrit et accessibles gratuitement par Internet.
Un simple commentaire : si les membres de la Commission ne sont pas capables de définir clairement des seuils sont-ils dignes d'être des enseignants ?
Au-delà des querelles de chapelles, les pratiquants se moquent de savoir si les techniques réclamées sont "les meilleures". L'erreur est de confondre critères de passage de dan et "valeur" des formes présentées. Le tout est que le programme soit raisonnable, clair, et publié. Chacun admet qu'il faut passer ces examens sur le mode "classique" (quitte à préférer jouer Beethoven jazzy, dans son dojo). Reste, bien sûr, à définir le "classicisme".
Encore faudrait-il préciser ce qui constitue une faute au 1er dan : un trou de mémoire très ponctuel ? une maladresse visiblement inhabituelle ? une émotion mal gérée ?
Formation des juges
Les sessions d"'information" seraient, à chaque fois, obligatoires pour tous les juges. Et ces derniers seraient mieux rémunérés. Chaque jury comporterait un président expérimenté, responsable des décisions, et assurant la "conduite accompagnée" des examinateurs frais émoulus.
Enregistrement des passages
Un enregistrement vidéo du passage serait officiellement fait, conservé, et une copie (payante) remise au candidat qui en ferait la demande.
Compte-rendu
Chaque session d'examen ferait l'objet d'un compte-rendu publié analysant globalement les tendances, et comportant orientations et préconisations.
Des statistiques précises concernant entre autre l'appartenance des candidats (dojos d'origine des candidats, professeur responsable, fédération de rattachement), et la mention d'éventuels redoublements, seraient établies à l'attention de la Commission. Une synthèse serait publiée.
Et un médiateur
Institution d'un "médiateur permanent" pour réguler les relations jury / candidats (donc à ne pas confondre avec le rôle du médiateur actuel), comme on en trouve actuellement dans toute institution.
Les conditions de la procédure de contestation seraient précisées.
CONCLUSION
Un risque de disparité de niveaux ?
Certes, c'est la rançon. Mais d'abord c'est ce qui existe aujourd'hui. Et ensuite, on peut vivre avec.
Pour prendre, encore une fois, un exemple hors-Aikido, en France (et c'est une particularité), le titre d'ingénieur n'est pas protégé (eh oui : n'importe qui peut se déclarer "ingénieur" en n'importe quoi). Mais un futur employeur demandera de quelle école on sort... Personne n'a intérêt à brader le niveau de son école.
En fait, le problème pourrait être posé autrement. Replongeons-nous un moment dans le système universitaire : un candidat qui soutient une thèse de doctorat est, sauf catastrophe, assuré du succès. Ce système n'est contesté par personne. Mais il repose sur la responsabilité personnelle du professeur, qu'il engage du simple fait de l'autorisation qu'il donne au candidat de se présenter. Ce professeur fait partie du jury et il ne cassera pas son élève, mais, en cas de médiocrité du candidat, en subira les conséquences sur sa propre carrière. Et la majeure partie de la note résulte du long travail que représente le document présenté. Ce qui se joue lors de la soutenance - et le principe est officiel - n'est que la mention.
Par analogie, ne pourrait-on prévoir un "carnet de contrôle continu", où le professeur s'engage sur la qualité de son élève candidat ? Bien sûr, il y a, pour le professeur, risque de perte d'élèves...
Un examen, pourquoi faire ?
Désirer un balisage officiel de son parcours est légitime pour un élève (tout comme ne pas le désirer, d'ailleurs) : cela existe dans bien d'autres disciplines y compris non-martiales : équitation, ski etc. Ce système a l'intérêt de révéler, chez le candidat, une aptitude à des révisions astreignantes et à une auto-discipline. D'autant plus qu'il est des dojos où les élèves parviennent au 1er kyu sans avoir jamais passé le moindre examen, et donc sans avoir jamais fait travailler leur "mémoire à long terme", et (c'est là qu'est l'essentiel) la réflexion personnelle qu'elle suppose.
Donc le principe d'un examen se défend très bien.
Mais la contestation vient du double langage du système actuel : se draper dans de grands principes pseudo-égalitaires pour organiser en toute tranquillité un système de passe-droit. Pour ceux qui tiennent à des marques de reconnaissance sans examen, rien n'empêche de créer en parallèle un Ordre du Mérite Martial ou des Palmes Académiques Aiki, comme c'est le cas actuellement au-delà du 4ème dan.
Au-delà des questions d'éthique, pourquoi persister à faire de cet examen le passage obligé pour la fonction d'enseignant ? Pourquoi ne pas organiser un concours d'entrée en formation d'enseignants, indépendamment du dan ? Ce serait plus honnête et desserrerait probablement l'étau (en le déplaçant, mais dans un contexte plus spécialisé).
Il conviendrait peut-être de mettre un jour un bémol aux tendances bien françaises qui consistent à vouloir échafauder nécessairement des abstractions tombées du ciel coulées dans le bronze, d'une sublime rigidité pour l'éternité, où le "qui" est surdimensionné par rapport au "quoi". Il n'est pas non plus indispensable d'étaler au niveau de l'Aikido international et à celui des différentes disciplines martiales bien de chez nous, nos démons rampants hexagonaux, et le petit côté french touch qui revient à ne savoir régler un problème qu'à coup de clash.
Pourquoi ne pas commencer de manière pragmatique, tout d'abord pour le 1er dan, dans une région décoincée, à titre expérimental, avec des candidats volontaires ? Essayer simplement...
L'Aikido n'est pas une collection de vérités révélées mais, entre autres bien sûr, une aptitude à prendre en compte un nombre invraisemblable de paramètres au niveau des conditions de l'attaque, de la morphologie des protagonistes, de leur tempérament etc. D'où la multitude et la richesse de ses courants.
A côté de tout ça, et il faut le rappeler à la fin, il est des examinateurs qui font honneur à notre discipline. Des gens qui rament tous les jours sans esbroufe, qui s'esquintent à remettre en question les certitudes foireuses, contre leur intérêt personnel. Qui sont préoccupés par des questions d'intégrité et de la promotion de l'Aikido, stupidement. Ce sont eux qui assurent l'avenir, ils ont du courage et il faut les saluer très bas, vraiment
Et puis... un témoignage personnel : la découverte d'un dojo parisien où tous les pratiquants, quel que soit leur dan, portent la ceinture blanche, à commencer par le professeur qui est 6ème dan et un des piliers fédéraux. Seule compte la compétence. Peut-être est-ce de ce fait, toujours est-il que le travail et son ambiance y sont d'une qualité exceptionnelle. Exotique éthique. Ceci étant dit avec le plus profond respect.
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